La Caricature

Mon Blog perso sur cette vision tordue de la réalité, plus vraie que la vraie.

  • Francisque Poulbot : L’Âme et le Crayon de Montmartre


    Sébastien Rieu

    Ma bande dessinée avec des personnages caricaturaux.

    J’ai édité à compte d’auteur un album de BD qui rend hommage à Poulbot, non pas pour coller mon nom à un grand artiste, mais tout simplement parce que j’adore son travail, et qu’en tant que dessinateur, il m’inspire. Vous pouvez trouver ma BD ici.

    Né le 6 février 1879 à Saint-Denis dans une famille d’enseignants, Francisque Poulbot est un artiste au parcours singulier. Aîné de six enfants, il montre un talent précoce pour le dessin mais, dans un geste qui définit son esprit indépendant, il refuse de se présenter à la prestigieuse École des Beaux-Arts, préférant une formation d’autodidacte. Dès 1900, ses illustrations commencent à paraître dans la presse parisienne. Son installation à Montmartre en 1899 est un tournant décisif. Il ne choisit pas les quartiers bourgeois, mais s’immerge dans la misère du « Maquis », un vaste bidonville où il découvre le quotidien des familles démunies et surtout de leurs enfants. C’est là qu’il trouve son inspiration majeure, capturant avec une tendresse infinie la vie des gamins des rues. Durant la Première Guerre mondiale, son art prend une tournure patriotique ; ses dessins, souvent férocement anti-allemands, sont largement diffusés et lui vaudront d’être assigné à résidence par l’occupant durant la Seconde Guerre mondiale. Il s’éteint à Paris le 16 septembre 1946 et repose au cimetière de Montmartre.

    Caricature de Francisque Poulbot jeune.

    La Spécificité de son Art : Le « Poulbot »

    Francisque Poulbot - les enfants et la guerre

    L’art de Poulbot est indissociable de la figure qu’il a créée et qui porte aujourd’hui son nom : le « poulbot ». Ce terme est entré dans le langage courant pour désigner un gamin de Paris, un « titi » gouailleur, débrouillard et touchant, héritier direct du Gavroche de Victor Hugo. La spécificité de son trait réside dans sa capacité à dépeindre l’enfance sans mièvrerie. Ses personnages, souvent vêtus de haillons, les cheveux en bataille, sont à la fois espiègles et graves. À travers leurs dialogues percutants et leur logique désarmante, Poulbot expose les hypocrisies et les injustices de la société adulte. Avant la guerre, dans des revues satiriques comme *L’Assiette au Beurre*, il utilise la fausse naïveté de ses enfants pour porter une critique sociale acérée. Pendant le conflit, ce même regard enfantin devient une arme de propagande redoutable, capable de susciter la pitié pour les orphelins, d’exalter le patriotisme et de déshumaniser l’ennemi.

    Son Apport à la Vie et la Culture Montmartroise

    L’engagement de Poulbot pour Montmartre dépasse largement le cadre de son art. Il n’était pas seulement un observateur, mais un acteur et un bienfaiteur de la Butte. En 1921, avec d’autres artistes, il co-fonde la République de Montmartre, une association caritative dont la devise est « Faire le bien dans la joie! ». L’une de ses actions les plus marquantes est la création, en 1923, du dispensaire « Les P’tits Poulbots ». Installé au départ dans le poulailler d’un ami restaurateur rue Lepic, ce dispensaire offrait des soins gratuits aux enfants nécessiteux du quartier, illustrant son dévouement total à la cause de l’enfance. L’association « Les P’tits Poulbots » perpétue aujourd’hui son œuvre et participe activement à la vie du quartier, notamment lors de la Fête des Vendanges.

    Francisque Poulbot - les Poulbots. Mon cher petit noël.

    Sur les Traces de Poulbot à Montmartre aujourd’hui

    Les Céramiques de la Rue Damrémont, créés par Poulbot en 1910.

    L’empreinte de Francisque Poulbot est encore bien visible pour qui se promène sur la Butte. Voici quelques lieux emblématiques : La Rue Poulbot : Située à quelques pas de la place du Tertre, cette petite rue pavée a été nommée en son honneur en 1967. Elle relie la rue Norvins à la place du Calvaire et abrite notamment l’Espace Dalí. Le Restaurant « Le Poulbot »: Au 3, rue Poulbot, ce restaurant rend un hommage direct à l’artiste. C’est un lieu qui célèbre l’esprit « bistrot gourmand » de Montmartre, avec une cuisine traditionnelle revisitée. Le Musée de Montmartre : Situé au 12, rue Cortot, ce musée est un lieu incontournable. Poulbot y a vécu pendant cinq ans. On peut y découvrir ses œuvres lors d’expositions temporaires, et un buste en bronze de l’artiste, réalisé par la sculptrice Agnès Rispal, trône dans les magnifiques jardins Renoir. Le musée dispose également d’une « Salle Poulbot » pour des événements. Les Céramiques de la Rue Damrémont : Dans le hall d’entrée de l’immeuble du 43 bis, rue Damrémont, se cache un trésor méconnu : une série de douze panneaux en céramique créés par Poulbot en 1910, représentant les quatre saisons à travers des scènes de jeux d’enfants. Sa Maison et sa Tombe: Sa dernière demeure, qu’il fit construire, se trouve au 13, avenue Junot. Enfin, il est inhumé dans la 9e division du cimetière de Montmartre, où l’on peut se recueillir sur sa tombe.

    Liens

    Musée de Montmartre : https://museedemontmartre.fr

    République de Montmartre : https://www.republique-de-montmartre.com

    Restaurant Le Poulbot: https://lepoulbot.com

    Ma galerie de dessins de Poulbot: https://www.caricature.fr/caricature/poulbot/

  • Chapeau melon et bottes de cuir : analyse d’une caricature des Anglais qu’on adore


    Par un journaliste impertinent et nostalgique.

    Caricatures de John Steed, Purdey, Tara King et Emma Peel, de la série Chapeau Melon et Bottes de Cuir

    Ah, l’Angleterre ! Son thé, son brouillard, ses gentlemen au flegme inébranlable et ses espionnes intrépides… Une image d’Épinal, me direz-vous ? Certes, mais une image que la télévision britannique a su magnifier avec un humour délicieusement caustique dans une série devenue culte : Chapeau melon et bottes de cuir. Loin d’être un simple feuilleton d’espionnage, cette pépite des années 60 et 70 est une véritable satire, un clin d’œil permanent aux stéréotypes les plus tenaces de la perfide Albion. Et c’est précisément pour ça qu’on l’aime encore aujourd’hui.

    Une satire tendre de l’Angleterre éternelle

    La série, qui a connu son heure de gloire alors que le monde était en pleine mutation, a su capter l’air du temps avec une audace et une distance qui forcent le respect. Le fameux « second degré » britannique y est érigé en art de vivre. John Steed, avec son parapluie-épée et son chapeau melon, n’est pas seulement un agent secret ; il est l’incarnation d’une Angleterre fantasmée, un dandy impassible face aux situations les plus abracadabrantes. Des savants fous aux complots les plus farfelus, rien ne semble pouvoir altérer sa courtoisie et son élégance. C’est là tout le génie de la série : jouer avec les codes jusqu’à la caricature, sans jamais tomber dans le ridicule. On se moque gentiment de cette Angleterre éternelle, de ses traditions et de ses excentricités, mais toujours avec une tendresse palpable. Une autodérision qui, avouons-le, manque cruellement à notre époque si prompte à se prendre au sérieux.

    Des héroïnes (enfin) modernes !

    Mais Chapeau melon et bottes de cuir ne serait rien sans ses héroïnes. Et quelles héroïnes ! À une époque où le rôle de la femme à la télévision se cantonnait bien souvent à celui de la potiche ou de la ménagère, la série a fait souffler un vent de modernité et d’émancipation. Bien avant que le féminisme ne devienne un sujet de conversation courant, les partenaires de John Steed étaient des femmes fortes, indépendantes et redoutablement intelligentes. Elles n’étaient pas les « demoiselles en détresse » que notre héros se devait de sauver, mais ses égales, voire ses supérieures dans bien des domaines.

    Le rapport entre Steed et ses compagnes est d’ailleurs d’une subtilité rare. Point de romance mièvre ou de passion dévorante. Entre eux, c’est un jeu constant de séduction intellectuelle, un badinage teinté de respect mutuel et d’une complicité à toute épreuve. Ils forment un couple professionnel avant tout, où l’admiration prime sur le désir. Cette relation, dénuée de tout machisme ordinaire, était d’une modernité confondante pour l’époque et continue de résonner aujourd’hui comme un modèle d’équilibre et d’intelligence.

    Lorsque la série bascule vers la couleur en 1967 avec l’arrivée d’Emma Peel, elle ne se contente pas d’adopter une nouvelle technologie : elle en fait un manifeste esthétique. Finie la grisaille londonienne, place à l’exubérance du Swinging London ! La production déploie des moyens considérables pour faire de chaque plan un tableau. Le parti pris est résolument pop, avec des décors aux couleurs vives et audacieuses, des papiers peints psychédéliques et un mobilier design qui capturent l’essence même de l’époque. La lumière est travaillée pour être intense, presque théâtrale, faisant éclater les rouges, les jaunes et les bleus. Le choix de tourner sur une pellicule 35mm de haute qualité, habituellement réservée au cinéma, et un traitement en post-production soigné confèrent à l’image une richesse et une profondeur inégalées à la télévision. Cette direction artistique flamboyante, loin d’être un simple gadget, devient un élément central de la narration, renforçant le côté surréaliste et délicieusement artificiel de l’univers. Chapeau melon et bottes de cuir est ainsi devenu un modèle du genre, une référence mondiale qui a prouvé que le petit écran pouvait être un terrain d’expérimentation visuelle aussi audacieux que le cinéma.

    Une galerie de portraits inoubliables

    Au fil des saisons, plusieurs visages ont marqué la série, chacun apportant sa pierre à l’édifice de ce monument télévisuel.

    John Steed : La colonne vertébrale

    Caricature de John steed de la série Chapeau Melon et Bottes de Cuir, incarné par Patrick Macnee

    Avant de présenter ses partenaires, il convient de rendre hommage à la colonne vertébrale de la série, le personnage immuable et flegmatique sans qui rien n’existerait : John Steed, incarné à la perfection par l’inoubliable Patrick Macnee. Steed est bien plus qu’un agent secret, il est l’incarnation d’un certain esprit britannique, un anachronisme volontaire et délicieux. Toujours vêtu d’un costume trois-pièces impeccable, coiffé de son célèbre chapeau melon et armé de son indispensable parapluie à multiples gadgets, il traverse les situations les plus périlleuses avec une élégance et une courtoisie désarmantes. Aristocrate jusqu’au bout des ongles, amateur de voitures de collection et de champagne, il préfère de loin le pouvoir de la persuasion et de la ruse à la violence brute, laissant bien souvent le travail physique à ses partenaires féminines. Patrick Macnee a si bien fusionné avec son personnage qu’il est aujourd’hui impossible de les dissocier. Il lui a insufflé cette chaleur, cet humour pince-sans-rire et cette classe intemporelle qui ont fait de John Steed une icône mondiale de la télévision.

    Dr. David Keel : Les débuts réalistes

    Au tout début, il y eut le Dr. David Keel (Ian Hendry), un médecin qui, suite à l’assassinat de sa fiancée, se retrouvait embarqué dans les sombres affaires de John Steed. Plus ancrée dans le réalisme du roman noir, cette première mouture posait les bases d’une série qui allait bientôt prendre son envol vers plus de fantaisie.

    Cathy Gale : L’experte en judo

    Puis vint Cathy Gale (Honor Blackman), l’anthropologue veuve, experte en judo et vêtue de cuir. Elle fut la première à véritablement incarner cette femme nouvelle, à la fois cérébrale et physique, posant les jalons du duo iconique qui allait suivre.

    Emma Peel : L’icône inégalée

    Car comment parler de la série sans évoquer l’inoubliable Emma Peel (Diana Rigg) ? Avec ses combinaisons avant-gardistes et son esprit vif, elle est sans conteste la partenaire la plus emblématique de Steed. Intelligente, audacieuse et terriblement sexy, elle forma avec lui un tandem dont l’alchimie reste inégalée. Mais l’ironie la plus mordante de cette histoire se trouve peut-être en coulisses. Alors qu’elle incarnait à l’écran l’une des figures les plus émancipées de la télévision, Diana Rigg dut se battre férocement pour obtenir un salaire décent. En découvrant qu’elle était moins bien payée que les cameramen de l’équipe technique, la comédienne n’hésita pas à taper du poing sur la table, menaçant de quitter la série. Elle obtiendra partiellement gain de cause pour sa deuxième saison, passant d’un salaire modeste à une rémunération plus digne de son statut de star. En menant ce combat bien réel, Diana Rigg rendit finalement le plus beau des hommages à son personnage : celui d’une femme qui ne se laisse pas faire, que ce soit face à un savant fou ou face à la misogynie ordinaire de l’industrie.

    Caricature d'Emma Peel de la série Chapeau Melon et Bottes de Cuir, incarnée par Diana Rigg

    Tara King : La relève enthousiaste

    Caricature de Tara King de la série Chapeau Melon et Bottes de Cuir, incarnée par Joanna Lumley

    Après son départ, la jeune et enthousiaste Tara King (Linda Thorson) prit la relève. Plus jeune et parfois un peu naïve, elle n’en était pas moins une agente redoutable, apportant une touche de fraîcheur et une dynamique légèrement différente à la série, plus proche d’une relation de mentor à élève.

    The New Avengers : Le trio des années 70

    Enfin, dans les années 70, la série renaît sous le titre The New Avengers (Chapeau melon et bottes de cuir en France, pour ne pas perdre le public). Steed, toujours impeccable, était désormais flanqué d’un nouveau duo : la longiligne Purdey (Joanna Lumley), ancienne danseuse de ballet aux jambes aussi redoutables que son esprit, et le fringant Mike Gambit (Gareth Hunt), un agent plus orienté vers l’action pure et dure. Ce trio apporta une nouvelle énergie à la franchise, s’adaptant aux codes de la décennie tout en conservant ce qui faisait le sel de l’original : un humour pince-sans-rire et des aventures délicieusement improbables.

    En somme, Chapeau melon et bottes de cuir est bien plus qu’une simple série d’espionnage. C’est le reflet d’une époque, un hommage malicieux à une culture britannique qui sait, mieux que quiconque, rire d’elle-même. Une leçon de style et d’irrévérence dont la télévision actuelle ferait bien de s’inspirer. Alors, remettons nos chapeaux melons, ajustons nos bottes de cuir et trinquons à la santé de ces inoubliables Vengeurs !

    Pour commander votre propre caricature, visitez ma page de caricatures sur commande.

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